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CJUE Commission Européenne c/ France 9 juin 2011

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CJUE
09/06/2011
C‑383/09
Directive habitats 2006/105/CE
Habitat, Protection stricte, mesures appropiées
ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

9 juin 2011 (*)

Dans l’affaire C‑383/09,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 25 septembre 2009,

Commission européenne, représentée par Mmes O. Beynet et D. Recchia, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République française, représentée par MM. G. de Bergues et S. Menez, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, MM. K. Schiemann, L. Bay Larsen (rapporteur), Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 octobre 2010,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 20 janvier 2011,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’instaurant pas un programme de mesures permettant une protection stricte de l’espèce Cricetus cricetus (grand hamster), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7), telle que modifiée par la directive 2006/105/CE du Conseil, du 20 novembre 2006 (JO L 363, p. 368, ci-après la «directive ‘habitats’»).

Le cadre juridique

2 La directive «habitats» a, comme l’indique son troisième considérant, pour but principal de favoriser le maintien de la biodiversité.

3 L’article 1er, sous a) à i), de ladite directive dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

a) conservation: un ensemble de mesures requises pour maintenir ou rétablir les habitats naturels et les populations d’espèces de faune et de flore sauvages dans un état favorable au sens des points e) et i);

[…]

g) espèces d’intérêt communautaire: celles qui, sur le territoire visé à l’article 2, sont:

i) en danger, excepté celles dont l’aire de répartition naturelle s’étend de manière marginale sur ce territoire et qui ne sont ni en danger ni vulnérables dans l’aire du paléarctique occidental

ou

ii) vulnérables, c’est-à-dire dont le passage dans la catégorie des espèces en danger est jugé probable dans un avenir proche en cas de persistance des facteurs qui sont cause de la menace

ou

iii) rares, c’est-à-dire dont les populations sont de petite taille et qui, bien qu’elles ne soient pas actuellement en danger ou vulnérables, risquent de le devenir. Ces espèces sont localisées dans des aires géographiques restreintes ou éparpillées sur une plus vaste superficie

ou

iv) endémiques et requièrent une attention particulière en raison de la spécificité de leur habitat et/ou des incidences potentielles de leur exploitation sur leur état de conservation.

Ces espèces figurent ou sont susceptibles de figurer à l’annexe II et/ou IV ou V;

[…]

i) état de conservation d’une espèce: l’effet de l’ensemble des influences qui, agissant sur l’espèce, peuvent affecter à long terme la répartition et l’importance de ses populations sur le territoire visé à l’article 2;

‘l’état de conservation’ sera considéré comme ‘favorable’, lorsque:

– les données relatives à la dynamique de la population de l’espèce en question indiquent que cette espèce continue et est susceptible de continuer à long terme à constituer un élément viable des habitats naturels auxquels elle appartient

et

– l’aire de répartition naturelle de l’espèce ne diminue ni ne risque de diminuer dans un avenir prévisible

et

– il existe et il continuera probablement d’exister un habitat suffisamment étendu pour que ses populations se maintiennent à long terme».

4 L’article 2, paragraphe 2, de la directive «habitats» précise que les mesures prises en vertu de celle-ci visent à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages d’intérêt communautaire.

5 Le grand hamster fait partie des espèces inscrites à l’annexe IV, sous a), de la directive «habitats». Cette annexe concerne notamment les espèces animales «d’intérêt communautaire qui nécessitent une protection stricte».

6 L’article 12, paragraphe 1, de la directive «habitats» prévoit:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant:

a) toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature;

b) la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration;

c) la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature;

d) la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.»

Les faits à l’origine du litige et la procédure précontentieuse

7 La Commission a été alertée sur l’état de conservation du grand hamster en Alsace par une plainte, dont elle a informé les autorités françaises lors d’une réunion qui s’est tenue le 15 janvier 2007.

8 Ces dernières ont transmis leurs observations à cet égard par notes des 15 février et 14 septembre 2007, par lesquelles elles informaient la Commission des mesures adoptées dans le cadre du plan d’action pour la conservation de l’espèce concernée au titre des années 2007 à 2011.

9 Par lettre de mise en demeure du 23 octobre 2007, la Commission a, d’une part, indiqué que les bilans de comptage du grand hamster faisaient apparaître une menace de disparition complète à très court terme de cette espèce et, d’autre part, a demandé à la République française de présenter ses observations à cet égard.

10 Par courriers des 24 décembre 2007 et 11 mars 2008, les autorités françaises ont exposé les mesures de protection déjà prises ainsi que celles prévues afin de sauvegarder ladite espèce.

11 Par lettre du 5 juin 2008, la Commission a adressé un avis motivé à la République française, aux termes duquel elle soutenait que, en n’adoptant pas un programme de mesures permettant une protection stricte du grand hamster, cet État membre avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive «habitats». En conséquence, la Commission invitait la République française à prendre les mesures requises pour se conformer audit avis motivé dans un délai de deux mois à compter de la notification de celui‑ci.

12 La République française a répondu à l’avis motivé en rappelant les contraintes géographiques limitant les possibilités de protection du grand hamster, mais en indiquant également qu’un arrêt de la chute des effectifs de cette espèce en 2008 avait été observé sur une partie du territoire alsacien. En outre, cet État membre a informé la Commission de l’état d’avancement des mesures mises en œuvre dans le cadre du plan d’action pour les années 2007 à 2011 pour la conservation de cette espèce.

13 Considérant que les modalités de conservation de ladite espèce mises en œuvre par la République française demeuraient insatisfaisantes, la Commission a introduit le présent recours.

Sur le recours

Argumentation des parties

14 La Commission soutient que l’espèce du grand hamster est menacée d’extinction en Alsace. En effet, le bilan des comptages ferait apparaître une diminution importante de l’espèce entre les années 2001 et 2007. Les causes de cette détérioration résulteraient de l’urbanisation et de l’évolution des pratiques agricoles.

15 Or, les mesures adoptées par la République française seraient insuffisantes et n’auraient pas interdit la détérioration des sites de reproduction et des aires de repos de ladite espèce. L’une des raisons essentielles de cette insuffisance, qui concernerait tant les mesures relatives à l’urbanisme que les mesures agricoles, serait le caractère trop limité du territoire, en particulier des zones d’action prioritaire (ci-après les «ZAP») et de l’«aire de reconquête» faisant l’objet de ces mesures. En outre, ces dernières seraient elles-mêmes insuffisantes. Ainsi, l’objectif visant à ce qu’il existe 22 % de cultures favorables au grand hamster dans les ZAP n’aurait été atteint que dans une seule des trois ZAP existantes. Par ailleurs, le programme d’action portant sur la limitation de la pollution par les nitrates pour les années 2008 à 2010 serait insuffisant. Enfin, les possibilités d’urbanisation dans l’«aire de reconquête» ne seraient pas suffisamment limitées.

16 La République française rétorque que les mesures qu’elle a adoptées constituent un ensemble cohérent, proportionné et adapté à l’objectif de protection stricte du grand hamster, conformément aux exigences de la directive «habitats». En particulier, le plan d’action pour les années 2007 à 2011 aurait permis de procéder à une définition précise du milieu particulier de cette espèce et de déterminer trois territoires d’action distincts, à savoir les trois ZAP, où tous les changements d’usage des sols en dehors de ceux liés à l’agriculture auraient été abandonnés, l’«aire de reconquête», dans laquelle, pour tout projet d’envergure égale ou supérieure à un hectare, il serait exigé que soit prouvée son innocuité sur l’espèce par une étude spécifique, et l’aire historique, où toutes les communes doivent prévoir, lors du renouvellement de leur document de planification de l’urbanisme, une étude spécifique consacrée au grand hamster.

17 La République française indique que, depuis la mise en œuvre dudit plan d’action, l’évolution de l’indice d’abondance des effectifs de l’espèce en cause dans les «zones noyaux» est susceptible de révéler la fin de la chute des effectifs, voire une légère augmentation de ceux-ci. Cependant, il faudrait avoir le recul de plusieurs années pour pouvoir évaluer, avec un degré suffisant de certitude, l’impact des mesures prises par les autorités françaises sur l’état de conservation des populations de ladite espèce. En tout état de cause, la Commission n’établirait pas que l’habitat de cette espèce aurait continué à se détériorer dans les ZAP après 2007, pas plus qu’elle ne démontrerait que la pollution par les nitrates est préjudiciable à celle‑ci. Enfin, la République française fait valoir que, dans l’«aire de reconquête», l’obligation de soumettre tout projet à une vérification d’impact sur des spécimens, des sites de reproduction ou des aires de repos du grand hamster est complétée par la nécessité d’effectuer une étude particulière, qui doit être réalisée pour tous les projets concernant une superficie supérieure à un hectare, en vue de vérifier les éventuels dommages causés à ladite espèce par un tel projet.

Appréciation de la Cour

18 Il convient de rappeler que l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive «habitats» impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV, sous a), de la même directive, dans leur aire de répartition naturelle, interdisant la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.

19 La transposition de cette disposition impose aux États membres non seulement l’adoption d’un cadre législatif complet, mais également la mise en œuvre de mesures concrètes et spécifiques de protection (arrêt du 11 janvier 2007, Commission/Irlande, C‑183/05, Rec. p. I-137, point 29).

20 De même, le système de protection stricte suppose l’adoption de mesures cohérentes et coordonnées, à caractère préventif (arrêts du 16 mars 2006, Commission/Grèce, C‑518/04, point 16, et Commission/Irlande, précité, point 30).

21 Un tel système de protection stricte doit donc permettre d’éviter effectivement la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos des espèces animales figurant à l’annexe IV, sous a), de la directive «habitats» (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2002, Commission/Grèce, C‑103/00, Rec. p. I‑1147, point 39).

22 Enfin, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 30 janvier 2002, Commission/Grèce, précité, point 23, et du 19 mai 2009, Commission/Italie, C‑531/06, Rec. p. I‑4103, point 98).

23 Il est constant que le délai de deux mois fixé par la Commission dans l’avis motivé pour permettre à la République française de se conformer à ce dernier a expiré le 5 août 2008.

24 À cet égard, il ressort des pièces du dossier que, entre 2001 et 2007, le nombre de terriers de grand hamster dans les «zones noyaux», qui ont servi de référence pour l’observation de la population de cette espèce, est passé de plus de 1 160 à moins de 180. En outre, selon le bilan des comptages pour l’année 2009, dressé par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage et dont le contenu n’est pas contesté par la République française, aucune population de ladite espèce n’atteint en Alsace le seuil minimal de population viable pour celle-ci, laquelle est estimée à 1 500 individus répartis sur une zone de sols favorables de 600 hectares d’un seul tenant.

25 Dans une lettre du 28 août 2009, adressée par le secrétaire d’État chargé de l’Écologie au préfet de la Région Alsace (ci-après la «lettre du 28 août 2009»), il est indiqué que, «[m]algré l’application des mesures consignées dans le plan de restauration en faveur du [grand hamster] (2007-2011) et les engagements respectifs des parties concernées par la sauvegarde de l’espèce, les résultats biologiques obtenus à ce jour sont insuffisants pour la sauvegarde de cette espèce en France» et que, dès lors, «il est impératif que le dispositif en faveur du grand hamster soit nettement et rapidement amélioré, de façon à obtenir à court terme des résultats biologiques attestant de la restauration de l’espèce».

26 La République française reconnaît que le développement de la culture du maïs, qui s’est effectué au détriment de la diversité des cultures, a été néfaste pour le grand hamster qui est dépendant des prairies artificielles, notamment de celles plantées en luzerne, et a constitué l’un des facteurs importants à l’origine du déclin de la population de cette espèce. Il est constant que, même au cours de ces dernières années, un tel développement n’a pas été complètement enrayé en Alsace, qui est, en France, la seule région où cette espèce est présente.

27 Au nombre des mesures visant à remédier à cette situation figure, notamment, la création de trois ZAP, qui sont des zones où tous les changements d’utilisation des sols autres que ceux liés à l’agriculture ont été abandonnés et pour lesquelles un objectif de 22 % de cultures favorables au grand hamster, soit 2 % de luzerne et 20 % de céréales à paille, a été établi en vue d’atteindre, à terme, une population viable d’environ 1 200 à 1 500 spécimens par zone.

28 À cet égard, il convient de relever que, selon les données scientifiques utilisées pour définir l’objectif de 22 % de cultures favorables dans les ZAP, que la République française a versées au dossier, «[l]ors d’une étude menée en 1997 par l’[Office national de la chasse et de la faune sauvage], sur 12 carrés-échantillons de 25 ha situés en terrain lœssique […], il a été observé que les trois carrés sur lesquels étaient cultivés plus de 2 à 4 % de luzerne ainsi que 20 à 30 % de céréales à paille présentaient les populations de grand hamster les plus conséquentes. Une augmentation du nombre de terriers y avait été notée entre le printemps et l’été, laissant supposer un environnement favorable au maintien et à la reproduction de l’espèce. Tel n’était pas le cas des neuf carrés restants, dans lesquels la luzerne était insignifiante ou inexistante et les céréales à paille nettement minoritaires».

29 Or, si la Commission ne conteste pas que les mesures dites agroenvironnementales adoptées en vue d’atteindre l’objectif de 22 % de cultures favorables à l’espèce en cause, en particulier le soutien financier apporté aux exploitants agricoles afin de privilégier la culture de la luzerne et des céréales d’hiver, sont de nature à orienter les pratiques agricoles dans un sens favorable à cette espèce, il ressort du dossier que, à la date du 5 août 2008, cet objectif de 22 % de cultures favorables à ladite espèce n’avait été atteint que dans l’une des trois ZAP, lesquelles ne représentent d’ailleurs que 2 % de l’ensemble des terres favorables au grand hamster.

30 Il convient d’ailleurs de relever à cet égard que les autorités françaises étaient conscientes de l’insuffisance de ces mesures puisque, d’une part, dans la lettre du 28 août 2009, le secrétaire d’État chargé de l’Écologie a demandé au préfet de la Région Alsace d’élaborer, pour le mois de septembre suivant, une proposition de modification des périmètres des ZAP, en particulier pour couvrir les secteurs situés à proximité de celles-ci qui hébergeaient des hamsters.

31 D’autre part, s’agissant de l’«aire de reconquête», les autorités françaises ont indiqué, dans des courriers adressés à la Commission à la suite de la notification de l’avis motivé, que la dynamique d’adaptation des pratiques agricoles, qui a contribué à la stabilisation positive des effectifs de grands hamsters dans les communes où la présence historique de ceux-ci est abondante, allait être étendue et amplifiée, et ce, notamment, par la mise en œuvre de mesures agroenvironnementales territorialisées visant à atteindre, au cours de l’année 2011, 22 % de cultures favorables à cette espèce sur la totalité de l’espace de vie de celle-ci.

32 La République française reconnaît également que le développement de l’urbanisation et des infrastructures inhérentes à celle-ci, en entraînant la disparition et le morcellement des terres agricoles, a constitué un autre facteur déterminant à l’origine du déclin de la population du grand hamster.

33 Pour ce qui est des mesures adoptées par cet État membre dans le domaine de l’urbanisme en vue de mettre fin à la détérioration ou à la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos de ladite espèce, il doit être constaté, en premier lieu, que l’interdiction de toute nouvelle urbanisation dans les ZAP, à supposer même qu’elle revête un caractère réellement contraignant, ne concerne, comme il a été dit au point 29 du présent arrêt, que 2 % de l’ensemble des terres favorables au grand hamster.

34 Il convient de relever, en deuxième lieu, que, si, dans l’«aire de reconquête», qui couvre, selon la République française, 49 % de ces terres favorables à ladite espèce, tout projet d’urbanisation égal ou supérieur à un hectare doit faire la preuve de son innocuité sur cette espèce par une étude spécifique et ne peut, si cette preuve n’est pas apportée, être réalisé qu’à la condition d’avoir obtenu une dérogation ministérielle, les pièces du dossier n’ont pas permis de contredire les affirmations de la Commission selon lesquelles, d’une part, les conditions d’octroi d’une dérogation ne sont pas déterminées avec précision et, d’autre part, aucune mesure de compensation n’est exigée lorsqu’une telle dérogation est accordée.

35 En troisième lieu, il est constant que les projets d’urbanisation d’une surface inférieure à un hectare n’étaient soumis, au 5 août 2008, à aucune formalité permettant de vérifier leur absence d’impact sur la conservation de l’espèce en cause. Au demeurant, il ressort de la lettre du 28 août 2009 que le secrétaire d’État chargé de l’Écologie a demandé au préfet de la Région Alsace de mettre en place un dispositif permettant le suivi exhaustif de ces projets et leur analyse en vue de confirmer qu’ils ne présentent pas un tel impact. Il a également prescrit qu’il soit rappelé que la présence desdits hamsters dans l’emprise de ces projets «justifie l’évitement ou une demande de dérogation», et ce quelle que soit la surface du projet.

36 Par ailleurs, dans ladite lettre, il était indiqué qu’un arrêté complémentaire relatif aux conditions de dépôt d’une demande de dérogation à la protection stricte du grand hamster et reprenant les termes de l’accord-cadre sur la gestion du milieu particulier de l’espèce était en voie de finalisation et devrait être publié au cours du mois de septembre de l’année 2009.

37 Il découle de ce qui précède que les mesures mises en œuvre à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé n’étaient pas suffisantes pour permettre d’éviter effectivement la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos du grand hamster.

38 Cela étant, pour ce qui concerne le prétendu caractère insuffisant du programme d’action pour les années 2008 à 2010 portant sur la limitation de la pollution par les nitrates, la Commission n’a, en tout état de cause, pas démontré à suffisance de droit l’existence d’un lien entre l’utilisation des nitrates en agriculture et la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos de ladite espèce.

39 Compte tenu de ce qui précède, il convient de faire droit au recours de la Commission sous réserve de ce qui est dit au point précédent du présent arrêt.

40 En conséquence, il y a lieu de constater que, en n’instaurant pas un programme de mesures permettant une protection stricte de l’espèce du grand hamster, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive «habitats».

Sur les dépens

41 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République française et celle-ci ayant succombé en l’essentiel de ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:

1) En n’instaurant pas un programme de mesures permettant une protection stricte de l’espèce du grand hamster (Cricetus cricetus), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, telle que modifiée par la directive 2006/105/CE du Conseil, du 20 novembre 2006.

2) La République française est condamnée aux dépens.
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Fiche créée le 21/12/2017 par Y Yasbaa   vue 6 fois.